Poussière sur Limoilou: des métaux lourds en concentration inquiétante | Le Soleil.

Publié le 22 novembre 2012 à 05h00 | Mis à jour le 22 novembre 2012 à 07h53

Le Soleil

Poussière sur Limoilou: des métaux lourds en concentration inquiétante

Les analyses commandées par Véronique Lallande ont démontré que la poussière rouge qui a recouvert le Vieux-Limoilou renfermait des métaux lourds en concentration inquiétante.

Échantillonnage

Photo: Patrice Laroche.

ISABELLE MATHIEU

(Québec) Avec un balai, des petits pots et une bonne dose de débrouillardise, Véronique Lalande et son conjoint ont démontré que la poussière rouge qui a recouvert leur quartier du Vieux-Limoilou n’était pas anodine, mais renfermait des métaux lourds en concentration inquiétante.

Bien en vue sur l’îlot de la pimpante cuisine, dans le duplex rénové de la 2e Rue dans Limoilou, une demi-douzaine de petits pots de plastique.

À l’intérieur, de la poussière brun-rouge, avec une brillance discrète.

Véronique Lalande et son conjoint Louis Duchesne se doutaient bien que la poussière qui s’abat sur eux épisodiquement n’était pas que du sable.

Le 26 octobre, un déchargement d’oxyde de fer mal arrosé chez Arrimage Québec dans le port a soulevé un nuage de particules rouges.

Ce jour-là, quand la poussière a tout coloré, du balcon aux petites mains de leur bébé Léonard, neuf mois, ça a été assez. Ils ont prélevé des échantillons et les ont expédiés chez Agat Laboratoires, une entreprise du Parc Technologique spécialisée dans les analyses de sol et d’eau.

Facture de 229 $

Cinq jours et une facture de 229 $ plus tard, le résultat frappe : la poussière est faite de fer, bien sûr, mais aussi de cuivre, de nickel, de plomb et de zinc, des métaux lourds qui peuvent être dommageables pour la santé en cas d’exposition à long terme.

Avec leurs résultats en main, Véronique Lalande et Louis Duchesne, un chercheur en foresterie, se sont mis en quête d’études sur la poussière de rue. Ils en ont trouvé plusieurs, un peu partout dans le monde.

Les chiffres montrent que le jour de la tempête rouge dans Limoilou, la concentration en métaux lourds dépassait, et de loin, les résultats obtenus dans de grandes villes industrielles ou très polluées.

Avec une concentration en nickel de 474 mg/kg, Limoilou devançait ce jour-là une mégapole comme New Delhi en Inde (138 mg/kg).

Une concentration en zinc de 998 mg/kg dans la poussière à Limoilou la place juste derrière New York (1811 mg/kg) et Hong Kong (1450 mg/kg).

Aussi, il y avait 644 mg/kg de cuivre dans l’air, soit 30 fois la concentration naturelle. En comparaison, les études faites à Birmingham en Angleterre montraient une concentration de 467 mg/kg et à New York, la concentration était de 355 mg/kg.

Le jeune couple ne comprend pas que ce sont eux, de simples citoyens, qui ont obtenu ces résultats et non, par exemple, le ministère de l’Environnement, qui a une station d’échantillonnage de la qualité de l’air à deux pas, sur la rue des Sables.

Zinc mystère

L’entreprise Arrimage Québec, responsable du nuage de poussière rouge dans Limoilou, ne remet pas en question les analyses faites par Véronique Lalande. Sauf qu’elle se demande d’où provenait le zinc trouvé dans les échantillons, puisqu’elle n’en a pas déchargé au port depuis le 5 septembre…

Le rapport des analyses chimiques rendu public dans les médias se révèle «très surprenant», affirme Johanne Lapointe, vice-présidente à Arrimage Québec. «On n’a pas fait de manutention de zinc depuis le 5 septembre, et c’était à l’intérieur de l’entrepôt, explique la gestionnaire. On ne remet pas l’étude en doute, mais on ne comprend pas.»

Pour le cuivre et le nickel, d’autres métaux lourds trouvés dans les échantillons de poussière, le déchargement et la manutention sont aussi faits à l’intérieur, précise Mme Lapointe. «Que ça fasse un nuage de poussière jusque dans Limoilou, dans des concentrations comme celles-là, je suis vraiment dépassé», affirme-t-elle.

Arrimage Québec a confié un mandat à la firme Génivar pour réviser de fond en comble les procédures d’opération.

De nouveaux canons à eau pour arroser les matières volatiles ont été ajoutés. Les autres correctifs suivront rapidement, assure Arrimage Québec.

L’entreprise installée depuis 30 ans au port a payé les frais de nettoyage pour la dizaine de citoyens qui ont communiqué avec elle. Ceux qui préféraient nettoyer eux-mêmes ont eu droit à une compensation de quelques centaines de dollars.

Notre demande d’entrevue à la direction régionale du ministère de l’Environnement est restée sans suite, mercredi.

Véronique Lalande ne demande pas de respirer l’air du Bas-du-Fleuve. «Mais je veux que les taux de métaux dans l’air soient compatibles avec le fait que mon bébé va jouer dans la cour l’été prochain», résume-t-elle.

via Poussière sur Limoilou: des métaux lourds en concentration inquiétante | Isabelle Mathieu | Environnement.

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