Sa Majesté contre l’Environnement | Journal de Québec.

PUBLIÉ LE: DIMANCHE 07 AVRIL 2013, 21H27 | MISE À JOUR: DIMANCHE 07 AVRIL 2013, 21H38

JOURNAL DE QUÉBEC,

Sa Majesté contre l’Environnement

Le Port de Québec invoque la Constitution pour se soustraire à la loi québécoise

Une longue bataille juridique pourrait opposer le Port de Québec et le gouvernement du Québec sur l’environnement (PHOTO D’ARCHIVES, KARL TREMBLAY).

RÉGYS CARON

Pendant que le gouvernement Marois lance sa gouvernance souverainiste, le bras maritime du gouvernement fédéral, par l’entremise du Port de Québec, tente de se soustraire à la Loi québécoise sur la qualité de l’environnement en invoquant la Constitution canadienne.

Une longue bataille juridique s’engage entre l’Administration du Port de Québec (APQ) et le ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP) au moment où des résidents du quartier Limoilou, à Québec, se plaignent de respirer des poussières de nickel à des concentrations dépassant plus de quatre fois la norme. Environnement Québec soupçonne que ces poussières proviennent du port, où sont manutentionnés d’importants volumes de minerais en vrac.

Ce litige juridique découle non pas des poussières de nickel, mais de l’entreposage de liquides en vrac par la compagnie IMTT-Québec au port de Québec. L’APQ et IMTT-Québec s’étaient pourtant entendues avec le ministère de l’Environnement du Québec, en juillet 2008, pour soumettre sept réservoirs de liquide en vrac à une évaluation environnementale par le BAPE, plusieurs mois après que la construction en fut terminée.

Le 20 septembre 2012, l’APQ et IMTT mettaient fin au protocole et intentaient une requête en jugement déclaratoire demandant à la Cour supérieure de déclarer la Loi québécoise sur la qualité de l’environnement inconstitutionnelle et inopérante sur le territoire du port de Québec. Cette loi empêche le Port de Québec d’accomplir sa «mission qui consiste à favoriser et à développer le transport maritime», soutient l’APQ.

En ce sens, le développement du port de Québec serait freiné par les contraintes imposées par la loi québécoise, soutiennent les deux requérants qui signalent s’être soumis aux exigences de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale.

«Sa Majesté la reine»

Le port de Québec appartient à «Sa Majesté» la reine Élisabeth II qui en confie la gestion à l’Administration portuaire de Québec, invoquent l’APQ et IMTT-Québec. En conséquence, le gouvernement du Québec n’aurait pas le pouvoir de légiférer, encore moins d’interdire, les activités de livraison, de transbordement, d’expédition et d’entreposage se déroulant au port de Québec, et pas davantage de les soumettre à l’examen du BAPE.

La loi constitutionnelle de 1867 confère au gouvernement fédéral préséance sur l’usage de ses propriétés et toute loi provinciale pouvant restreindre les activités s’y déroulant est inapplicable, soutiennent l’APQ et IMTT-Québec dans leurs documents soumis à la cour, au palais de justice de Québec.

«Le cœur essentiel et vital d’une compétence fédérale échappe à l’application d’une loi promulguée par le gouvernement provincial», écrivent-ils.

Ainsi, la Loi québécoise sur la qualité de l’environnement constituerait une entrave au bon déroulement et au développement des activités portuaires notamment parce qu’elle autorise le «ministre responsable provincial à interdire diverses formes d’utilisation et de développement des installations et, de surcroît, dans le cas d’une violation, d’en ordonner la démolition», ce qui serait contraignant et illégal aux yeux de l’APQ et de IMTT-Québec.

Québec conteste

Québec n’est pas du même avis. Dans un «avis d’intention» destiné au Procureur général du Canada déposé le 4 mars 2013, le ministre de la Justice du Québec informe la cour qu’il «a l’intention de faire déclarer invalides ou inapplicables» certains articles de la Loi maritime du Canada et des Lettres patentes de l’Administration portuaire de Québec.

Le Procureur général du Québec (PGQ) entend contester les prétentions de l’APQ qui soutient que les terrains sur lesquels se trouvent les réservoirs d’IMTT sont de propriété fédérale. «Les questions de fond soulevées lors de l’audition seront complexes, car principalement de nature constitutionnelle et, plus spécifiquement, en lien avec le partage des compétences fédérales/provinciales», écrit le PGQ dans son avis.

Ce litige risque fort d’aboutir en Cour suprême. Il faudra donc être patient avant de savoir qui aura gain de cause. En attendant, l’APQ et Environnement Québec sont condamnés à se parler et à trouver un moyen de s’entendre, particulièrement si le port de devait être la source d’où proviennent les poussières de nickel qui menacent la santé des citoyens du quartier Limoilou à Québec.

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