Projet d’agrandissement du Port de Québec: pas d’examen préalable du fédéral | Le Soleil.

Publié le 17 octobre 2014 à 05h00 | Mis à jour à 06h14

Projet d’agrandissement du Port de Québec: pas d’examen préalable du fédéral

Le Port de Québec. PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL, YAN DOUBLET

 

ANNIE MORIN

Le Soleil

(Québec) L’Agence canadienne d’évaluation environnementale (ACEE) laisse au Port de Québec le soin de réaliser, selon ses propres critères, les études environnementales portant sur son projet d’agrandissement, qui inclut le remblaiement d’une partie de la Baie de Beauport et l’aménagement d’un quai en eau profonde. Le ministère des Pêches et Océans donnera son opinion.

Depuis la révision de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, en 2012, seuls les «projets désignés», de gros projets susceptibles d’avoir des effets importants sur l’environnement, doivent faire l’objet d’un examen préalable supervisé par l’agence fédérale.

C’est le cas pour tout nouveau terminal maritime, «sauf s’il est situé sur des terres qui sont utilisées de façon courante comme terminal maritime et qui l’ont été par le passé ou que destine à une telle utilisation un plan d’utilisation des terres ayant fait l’objet de consultations publiques», dicte le règlement applicable.

«Selon l’information dont nous disposons, l’agrandissement du secteur Beauport du port de Québec ferait partie de la deuxième catégorie», écrit Christian Vezeau, conseiller principal en communications de l’ACEE, en réponse aux questions du Soleil.

Vérification faite, le plan d’utilisation des sols de l’Administration portuaire de Québec (APQ), qui date de 2001 et doit être révisé en 2015, traite abondamment de l’agrandissement dans le secteur de Beauport, un projet dans les cartons depuis les années 80.

L’article 67 de la Loi impose par ailleurs aux administrations portuaires, considérées comme des «autorités fédérales», l’obligation de s’assurer que le projet «n’est pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants». La façon de procéder est libre à chacun, à condition d’en informer le ministère fédéral des Transports.

L’Administration portuaire de Québec a pour habitude de commander une «étude des effets environnementaux» aux promoteurs qui veulent réaliser des projets sur les terres fédérales dont elle a la gestion. Un comité de trois employés du Port examine les documents déposés.

Arrimage Québec a dû se soumettre au processus avant d’ériger son terminal de granules de bois à l’anse au Foulon. Des experts externes ont alors été appelés en renfort. Le Port s’impose la même discipline quand il est promoteur, comme c’est le cas pour l’agrandissement, dont le financement reste à attacher avec le gouvernement fédéral et des partenaires privés.

Nancy Hudon, conseillère en environnement à l’APQ, confirme que le Port avait la même interprétation que l’agence fédérale et s’accommode bien de cette relative indépendance en matière d’évaluation environnementale.

De multiples études

Environ une vingtaine d’études environnementales ont été lancées dans la dernière année, estime-t-elle, en plus d’une dizaine d’études d’ingénierie. Comme le projet prévoit empiéter sur le fleuve – environ 14 des 17 hectares prévus pour les nouveaux quais nécessitent du remplissage -, la faune et la flore aquatiques font l’objet d’une attention particulière.

Des consultants réalisent ces mandats pour le Port, qui espère recevoir les derniers résultats dans les prochaines semaines.

Mme Hudon précise que Pêches et Océans Canada aura son mot à dire dans la démarche. À titre d’autorité fédérale concernée, le ministère analysera l’étude des effets environnementaux produite par le Port et pourra lui poser des questions, voire le renvoyer à sa table de travail, avant d’exprimer un avis final.

En vertu de la Loi sur les pêches, le Port doit également présenter des mesures de compensation pour la perte d’habitat des poissons. Pêches et Océans doit les examiner et les approuver, souligne la conseillère du Port.

«On n’est pas seuls dans le processus. Il y a un autre ministère au moins et on est en train de voir si d’autres ministères vont être impliqués», insiste-t-elle.

Enfin, le Port organisera une consultation publique dans les prochains mois. Le président-directeur général, Mario Girard, l’a promis. Le projet y sera présenté, ainsi que l’étude des effets environnementaux, et les avis des citoyens seront sollicités.

«On n’est pas seuls dans le processus. Il y a un autre ministère au moins et on est en train de voir si d’autres ministères vont être impliqués»

Nancy Hudon, conseillère en environnement à l’Administration portuaire de Québec

Kevin Parent annule son spectacle

Le chanteur Kevin Parent a annulé le spectacle qu’il devait donner dimanche à l’occasion des portes ouvertes du Port de Québec, après avoir été informé par des citoyens des épisodes de pollution en provenance des installations portuaires. Son agent invoque un conflit d’horaire.

Tête d’affiche de la journée d’activités organisée par l’Administration portuaire de Québec (APQ), Kevin Parent devait se produire dimanche après-midi à l’Agora du Vieux-Port. Son nom figurait encore sur la programmation jeudi matin, mais il a été remplacé par Les Respectables en cours de journée.

L’artiste d’origine gaspésienne, dont la défection remonte au début de la semaine, est connu pour ses prises de position environnementales. Il a notamment manifesté contre le projet d’incinérateur de sols contaminés de Belledune, dans la baie des Chaleurs, et plus récemment contre l’exploitation pétrolière en Gaspésie.

«C’est certain que Kevin, vous le connaissez comme moi, est reconnu comme une personne assez près de la nature. Mais reste que le fond de la question, c’est vraiment un conflit d’horaire. Kevin participe à une émission [de télévision] samedi soir, et ça devenait plutôt compliqué de gérer l’horaire», a expliqué jeudi son agent, Vincent Loiselle.

Ce dernier a admis que le chevauchement était connu au moment d’accepter le contrat, mais que la situation apparaissait désormais intenable. Il a aussi reconnu que le chanteur a été sensibilisé tout récemment à la dynamique des dernières années, qui oppose des citoyens des quartiers Limoilou et Vieux-Québec à l’APQ et à ses locataires. La poussière générée par les opérations de transbordement est au centre du débat, qui s’est transporté devant les tribunaux avec le dépôt d’un recours collectif.

«C’est tout à fait pertinent», a jugé M. Loiselle, tout en précisant que «ce n’est pas une question sur laquelle on veut s’engager pour le moment».

C’est le groupe Vigilance Port de Québec qui a pris l’initiative de sensibiliser Kevin Parent à sa cause en lui envoyant de l’information par courriel. Sa porte-parole, Véronique Lalande, a admis jeudi qu’elle avait sursauté en constatant l’association de l’artiste – qu’elle «respecte énormément» – avec le Port de Québec. «On s’est dit : c’est un adulte majeur et vacciné. Peut-être que s’il connaissait l’ensemble de la situation, ça rentrerait dans sa réflexion», a-t-elle raconté.

Mise au courant de la décision de l’artiste, Mme Lalande s’en réjouissait jeudi. Elle est convaincue que l’intervention des citoyens «a pesé dans la balance», même si elle se défend de «pavoiser».

Activité critiquée

La citoyenne n’a pas manqué de critiquer l’opération portes ouvertes du Port, qui offre gratuitement des visites de ses installations, des croisières sur le fleuve et des divertissements pour la famille. «Ça fait deux ans qu’on demande des réponses à nos questions et qu’est-ce qu’on a comme réponse? Des clowns et des jeux gonflables», a-t-elle ironisé.

Le porte-parole de l’Administration portuaire de Québec, Anick Métivier, a pour sa part repris l’argument du conflit d’horaire. «Ce que j’ai comme information, c’est qu’il risquait d’arriver trop en retard pour les prises de son du matin et ça causait problème», a-t-il souligné, repoussant l’hypothèse d’un différend idéologique.

En bref

Les favoris dans Lévis se font discrets

Les deux candidats qui semblent les plus près d’une victoire dans Lévis lundi sont aussi ceux qui se font les plus discrets à propos du projet de quai qui pourrait servir à exporter du pétrole au port de Québec. La libérale Janet Jones a refusé de se prononcer. «On ne commentera pas aujourd’hui tout simplement parce qu’on est en campagne électorale», a dit son attachée de presse. «Mme Jones, son but, c’est de se faire élire lundi.» Du côté de la Coalition avenir Québec, le candidat François Paradis ne sentait pas assez à l’aise avec le dossier pour prendre position. Comme l’avait fait Agnès Maltais plus tôt cette semaine, le péquiste Alexandre Bégin s’est dit contre le projet. À Lévis, dit-il, le raffinement de pétrole crée des emplois et génère des retombées économiques. Mais le projet du Port ne vise que l’exportation – avec les risques que cela comporte – sans retombée, selon M. Bégin. Le candidat de Québec solidaire, Yv Bonnier Viger, renchérit que les risques de fuites sont particulièrement élevés au point de transbordement. Le projet l’inquiète «beaucoup».

Stéphanie Martin et Simon Boivin

Labeaume réitère son appui au Port

Régis Labeaume n’est pas contre de l’éventuelle exportation de pétrole à partir du port de Québec. «Tous les ports veulent être impliqués dans le transport de pétrole, car ce sont des revenus», a commenté le maire de Québec à propos des nouvelles infrastructures planifiées à la Baie de Beauport. Elles permettraient d’exporter du pétrole brut des sables bitumineux de l’Ouest canadien. Un marché qu’étudie présentement l’administration portuaire de Québec. Le maire a réitéré jeudi sa promesse faite le mois dernier de donner son appui indéfectible aux projets du Port. «Il n’y a aucun doute, je vais appuyer l’expansion», a-t-il dit. De toute façon, «on va avoir besoin du pétrole pour encore trois, quatre ans», a ironisé le maire. «J’entends qu’on ne veut pas d’oléoducs, on ne veut pas qu’il soit transporté par train, et je commence à être assez d’accord avec ça. Aussi, on ne veut pas qu’il le soit par bateau. Mais c’est facile d’être contre le transport du pétrole en général. Mais une fois qu’on a dit ça, qu’est-ce qu’on fait? Moi, j’attends juste des solutions.»  Valérie Gaudreau

via Projet d’agrandissement du Port de Québec: pas d’examen préalable du fédéral | Annie Morin | Transports.

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