Réfléchir au lieu d’agrandir le port | Le Soleil.

Publié le 11 juin 2016 à 17h09 | Mis à jour à 17h09

Réfléchir au lieu d’agrandir le port

Le Port de Québec... (Photothèque Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve)

Le Port de Québec. PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL, JEAN-MARIE VILLENEUVE

POINT DE VUE
Le Soleil
L’assemblée annuelle de l’Administration portuaire de Québec s’est tenue vendredi dernier au terminal Ross-Gaudreault. La table était mise pour que le Port de Québec et son pdg, Mario Girard, rendent compte de leurs actions et projets à la vingtaine de citoyens présents et à la communauté maritime. J’y étais avec des citoyens de Beauport, de Limoilou et de la Haute-Ville qui militent pour de meilleurs accès au fleuve et des activités portuaires moins polluantes.

Plusieurs personnes ont posé des questions. Un citoyen de Limoilou voulait savoir quand les activités de transbordement de vrac solide cesseraient de se faire à ciel ouvert et quand le Port investirait enfin dans du transbordement sous couvert, ce à quoi M. Girard a répondu longuement, pour finalement dire qu’il n’était pas réaliste d’envisager couvrir les matières solides en vrac, ce qui pourtant réglerait les problèmes de poussières métalliques dans les quartiers voisins.

Le pdg a aussi affirmé que «les terrains actuels qu’on a au port de Québec, lorsqu’ils ont été à pleine capacité – on a vu ça en 2012 - ne génèrent pas suffisamment de revenus pour permettre la restauration de nos actifs portuaires». Environ 300 millions $ de travaux seraient requis pour entretenir les infrastructures vieillissantes le long du fleuve à Québec et à Lévis. Ça ressemble à un discours de quémandeur.

Bref, dans un contexte où le Port ne génère pas suffisamment de revenus pour investir dans l’entretien de ses infrastructures et où il a encore moins d’argent pour faire du transbordement sous couvert, est-il pertinent de poser la question : le Port a-t-il demandé et demande-t-il le juste prix à ses clients? Il semble que non. On peut se demander s’il offre ainsi des avantages financiers indirects à ses clients, au détriment des autres ports du Saint-Laurent et au grand désespoir des habitants de Limoilou qui subissent la pollution issue de ces opérations dignes du XIXe siècle.

Malgré le besoin d’investir massivement dans ses infrastructures et une nouvelle baisse du tonnage en 2015 – la troisième en trois ans - le pdg maintient que le projet d’agrandissement Beauport 2020 est toujours aussi justifié. Depuis 2012, avec un sommet de 33,1 millions de tonnes de marchandises manutentionnées, les dirigeants assistent à la dégringolade des quantités de vrac liquide et solide, de 32 % sur trois ans.

Quelle est donc cette logique d’affaires? Toutes les banques, les petites et moyennes entreprises et les citoyens qui gèrent leur budget en bon père de famille savent qu’on investit après avoir engendré des surplus et des marges de manoeuvre financières qui se manifestent lors des années de croissance.

Il est intéressant d’observer ces temps-ci la situation au nouveau quai multi-usager de Sept-Îles où, selon la journaliste de la Côte-Nord Fanny Lévesque, certaines entreprises ont investi des millions de dollars en partenariat pour développer ce terminal d’une capacité annuelle de 50 millions de tonnes de minerais, terminal que la décroissance de l’industrie minière rend à ce jour inactif. Or au Port de Québec, 70 % des marchandises sont transbordées d’un bateau vers le quai puis à un autre bateau. Le port de Sept-Îles pourrait-il être utilisé davantage pour ce genre de transbordement des matières en vrac le long du Saint-Laurent?

Au lieu de vouloir profiter du creux pour se créer de nouveaux terrains à même le fleuve avec Beauport 2020, le Port de Québec devrait plutôt en profiter pour réfléchir aux façons de collaborer avec les autres ports du Saint-Laurent, réflexion que les citoyens lui demandent de faire, sans succès, depuis 40 ans.

Daniel Guay, Québec

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