Silos à l’anse au Foulon: un dôme surgit dans la nuit | Le Soleil.

Publié le 17 novembre 2013 à 05h00 | Mis à jour à 09h22

Silos à l’anse au Foulon: un dôme surgit dans la nuit

Du haut de ses 45 mètres, le silo à l’anse au Foulon s’impose dans le paysage. Le voici derrière le presbytère Notre-Dame-de-la-Garde, sur la rue Champlain. PHOTO LE SOLEIL, PASCAL RATTHÉ

SAMUEL AUGER

(Québec) La poussière n’est peut-être pas retombée dans le débat sur le terminal de granules de bois en bordure du fleuve Saint-Laurent, mais le premier silo, lui, est déjà bien ancré dans le paysage. L’imposant dôme blanc de 45 mètres de hauteur a surgi telle une plante magique dans l’espace d’une nuit à l’anse au Foulon, attirant son lot de passants et curieux.

Les citoyens font connaissance depuis samedi matin avec le nouveau phare de l’anse au Foulon, une structure controversée et visible du boulevard Champlain, du haut de la falaise et même de Lévis.

Les esquisses et les projections des derniers jours ont cédé la place à la réalité. La membrane gonflable du premier silo de granules de bois a été gonflée avec succès. Dans l’oeil du citoyen ou du touriste, le silo a déjà pris forme, même si la construction intérieure ne fait que commencer. Et qu’un deuxième silo tiendra compagnie à la structure blanche à l’anse au Foulon l’an prochain.

À vélo, à pied ou en voiture, le silo d’Arrimage Québec est immanquable et se pointe à l’horizon plusieurs centaines de mètres à l’avance. Samedi matin, il était l’attraction du jour.

Les conducteurs de voiture se garaient pour l’observer. Les cyclistes prenaient une pause pour le photographier. Les piétons le scrutaient d’un oeil perplexe. Les commentaires, eux, fusaient de toute part. «Trop gros», «trop imposant». «Pas si pire que ça», entendait-on aussi. Le blanc immaculé – pour l’instant – semblait plaire à quelques-uns.

«C’est gros»  

Véronique Lalande, elle, n’a pas aimé sa découverte matinale. La porte-parole du Comité de vigilance des citoyens envers le Port de Québec a rencontré le Soleil au pied du dôme samedi matin. Un premier contact avec cet objet qu’elle a dénoncé sur toutes les tribunes.
«C’est physiquement imposant. C’est gros», dit-elle. «Et il faut penser qu’il va y en avoir deux.»

La militante constatait comme bien d’autres l’ampleur de la construction. La vue du fleuve Saint-Laurent est bloquée, souligne-t-elle. Le dôme tout de blanc projette aussi une ombre considérable sur la promenade et la piste cyclable, fait-elle remarquer.

Aussi stupéfaite soit-elle, Véronique Lalande n’était pas tellement choquée par la grosseur du dôme. «Pour moi, c’est pas tant l’impact visuel. Ce que je vois, c’est pas tant la chose, une boule blanche. Ce que je vois, c’est vraiment le symbole d’un mépris de l’ensemble d’une communauté.»

Imposant, le dôme? Elle l’a toujours répété – au Port, aux citoyens, aux médias. «C’est le fait qu’il soit déjà là, malgré l’opposition de la majorité des gens qu’on n’a pas écoutés.»

«Deux poids. deux mesures»

La citoyenne n’en revenait pas encore de la vitesse fulgurante du processus. Anecdote personnelle. Comme propriétaire résidentielle, elle a voulu récemment modifier la tôle du tambour de sa cour. De longs mois de propositions, contre-propositions et négociations avec la Ville ont été requis. «Et on parle d’impact visuel pour mes deux voisins d’en arrière, qui honnêtement, n’en avaient rien à cirer», dit-elle. «Malgré tout ça, j’accepte cette logique, que je vis dans une communauté, que je ne suis pas toute seule, moi avec mes affaires. Et je dois me plier à un certain nombre de règlements pour assurer la paix sociale et la cohésion dans un milieu.»

Le Port de Québec, lui, prend la voie rapide, estime Véronique Lalande, «en montant un silo durant une nuit, alors que tout le monde lui dit que ça n’a pas de sens», un «deux poids, deux mesures» qui la choque au plus haut point. «Si vous vouliez faire ça dans votre cour chez vous, en une nuit, est-ce qu’on vous laisserait faire ça? Poser la question, c’est y répondre.»

Véronique Lalande a été l’objet d’une mise en demeure cette semaine par Arrimage Québec pour propos jugés diffamatoires. Elle a crié à l’intimidation, et reçu l’appui de citoyens, mais aussi d’élus provinciaux et fédéraux. «Qu’on s’attaque comme ça à une simple citoyenne qui reste dans la limite de la démocratie, c’est quelque chose qui a choqué», relate-t-elle.

La menace juridique ne sert à rien, promet toutefois la porte-parole du comité de vigilance. «Je ne vais pas arrêter, et je ne vais certainement pas moduler mon discours!» L’érection d’un premier dôme la sonne. Mais pas assez pour la mettre au tapis. «Oui, ça me décourage… Mais après ça, je me dis, ça suffit! On va continuer de dénoncer et se battre pour qu’on aille une discussion.»

Dans la cour du Port

Ghislain Fortier a un nouveau voisin. Le premier dôme de granules de bois a pris forme dans la nuit de vendredi à samedi tout juste en face de chez lui, à environ 150 mètres de sa résidence du boulevard Champlain.

«C’est moins pire que les réservoirs à essence qu’il y avait. Ça, c’est sûr et certain», reconnaît d’emblée Ghislain Fortier, qui a toujours eu le Port de Québec comme voisin. La résidence du boulevard Champlain est dans la famille depuis un demi-siècle. La vocation industrielle du secteur, il la connaît bien.

Samedi matin, l’apparition soudaine du silo ne l’a pas choqué outre mesure. «Visuellement, il y en a qui trouvent ça beau, et d’autres trouvent ça laid. Personnellement, c’est beau, c’est blanc… mais est-ce que ça va rester blanc des années de temps?»

Blanc pour longtemps?

La membrane gonflable blanche était encore immaculée lors du passage du Soleil. «Est-ce que ça va rester beau des années de temps?» se demande le citoyen. «Avec les années, des petites taches de rouille, la poussière… ça va être joli. À quelques kilomètres du Château Frontenac, ça va être de toute beauté», ironise-t-il.

Comme bien d’autres, Ghislain Fortier a compris tout récemment l’ampleur du projet qu’il verra tous les jours de son balcon. «On a reçu un beau petit dépliant en papier glacé par la poste il y a deux semaines, mais ils nous ont jamais présenté le projet en assemblée ici», déplore-t-il.

Il se dit inquiet de la sécurité des dômes, où seront entreposés des granules de bois. «C’est sûr que c’est concernant le côté sécurité qu’on a peur un peu, les incendies ou les explosions», dit-il.

Jamais le Port n’a tenté de rassurer la poignée de résidants touchés par le projet, déplore-t-il. «Ils ont jamais pensé ramasser les six ou sept maisons pour les informer ou les rassurer. Pantoute. Pas un mot. On fait ce qu’on veut, quand on veut! Le Port de Québec n’a pas fait son travail pour rassurer les gens.»

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