Québec perd contre le Port | Le Soleil.

Publié le 08 septembre 2016 à 17h07

Environnement: Québec perd contre le Port

Le juge Gilles Blanchet conclut que la législation... (Photothèque Le Soleil)

Le juge Gilles Blanchet conclut que la législation fédérale a prépondérance sur les normes provinciales du ministère de l’Environnement en territoire portuaire. PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL

ANNIE MORIN
Le Soleil

(Québec) Le gouvernement du Québec ne peut imposer ses règles environnementales sur les terrains du Port de Québec, vient de trancher la Cour supérieure.

Le juge Gilles Blanchet a rendu jeudi un jugement attendu et étoffé de 67 pages, où il conclut que la législation fédérale a prépondérance sur les normes provinciales en territoire portuaire.

Le dossier remonte à 2012. IMTT-Québec, gestionnaire du terminal de vrac liquide, s’était alors braqué contre le ministère québécois de l’Environnement, qui voulait tenir des audiences publiques sur l’implantation de sept réservoirs de produits chimiques et pétroliers dans le secteur de Beauport. L’entreprise n’avait pas obtenu de certificat provincial avant leur érection à partir de 2007, mais elle détenait une autorisation du fédéral, délivrée par l’Administration portuaire de Québec (APQ).

Pour échapper au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), qui devait étudier le dossier a posteriori, IMTT a déposé une demande en jugement déclaratoire, appuyée par le Port et le gouvernement canadien. Il a fallu attendre trois années pour que les parties se retrouvent en cour et une de plus pour obtenir une première décision.

Après un aride débat à saveur historique, juridique et même sémantique, le juge Blanchet en est venu à la conclusion que tout est fédéral dans le dossier : le terrain, l’entreprise, les lois et les règlements. Il reconnaît tout de même au provincial le droit d’établir ses propres normes environnementales, mais elles ne s’appliquent pas en milieu portuaire, selon lui, puisque le fédéral a «le dernier mot» sur tout ce qui touche la navigation et les installations portuaires.

Pouvoir discrétionnaire

«Dans le cas particulier de la Loi sur la qualité de l’environnement du Québec et des règlements adoptés sous son empire, le conflit d’intention le plus manifeste réside dans les nombreuses dispositions qui confèrent au ministre un pouvoir discrétionnaire quasi absolu sur la recevabilité et l’acceptabilité de tout projet susceptible d’avoir un impact environnemental quelconque», écrit le magistrat, déplorant «l’incertitude, les délais et la perspective d’un refus éventuel» qui pourraient jouer contre le fédéral.

Ce jugement intéressera Arrimage Québec, autre locataire du Port, qui conteste aussi les interventions environnementales du gouvernement provincial devant les tribunaux. Des constats d’infraction lui ont notamment été distribués pour l’émission de poussières de nickel dans l’atmosphère et la construction d’immenses silos pour entreposer des granules de bois à l’anse au Foulon.

Pour le ministère de l’Environnement, c’est une défaite cinglante, lui qui a toujours soutenu que sa législation s’appliquait sur le territoire du port. «On va analyser la décision. On a 30 jours pour décider si on va en appel», a brièvement commenté jeudi Émilie Simard, attachée de presse du ministre David Heurtel.

Marc Dulude, vice-président d’IMTT-Québec, a admis être «extrêmement content» du jugement, qui selon lui fait la preuve qu’«on a toujours respecté la loi». Mais les procureurs de l’entreprise doivent en faire une étude plus poussée avant de commenter plus avant.

L’APQ a aussi réagi très sobrement. «Le Port prend acte du jugement et notre équipe va prendre le temps d’en prendre connaissance», a fait savoir sa porte-parole, Marie-Andrée Blanchet.

Il y a peu de chance que le dossier soit clos pour autant. Dès les premières minutes du procès l’an dernier, toutes les parties impliquées ont fait savoir qu’elles étaient prêtes à se rendre jusqu’en Cour suprême pour trancher définitivement la question.

Source : Environnement: Québec perd contre le Port | Annie Morin | Justice et faits divers

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