Le Port de Québec tente de calmer le jeu | Le Soleil.

Publié le 22 mars 2013 à 05h00 | Mis à jour à 08h01

Le Soleil

Nickel dans Limoilou: le Port de Québec tente de calmer le jeu

Le pdg Mario Girard assure qu’«on prendra les actions qu’il faudra» s’il s’avère que la contamination de l’air au nickel vient du Port. Mais pour l’heure, il préfère s’en remettre à la Santé publique (PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL, ERICK LABBÉ).

JEAN-FRANÇOIS CLICHE

(Québec) Sans dire que le Port de Québec est au-dessus de tout soupçon, son pdg Mario Girard estime qu’il est encore beaucoup trop tôt pour accuser son organisation d’être la source de la pollution au nickel qui flotte sur Limoilou depuis quelques années.

«Moi aussi, j’ai deux filles, de deux ans et sept ans, et si j’étais citoyen de Limoilou et que je lisais tout ce qui s’écrit en ce moment, je serais très préoccupé, même si je pense que ça manque de factuel dans certains cas. Ça me préoccupe et on fait tout ce qu’il faut. [… Mais] actuellement, on n’a pas les données qui nous permettent de conclure que le port est la source du nickel. On fait des liens qui ne se font pas, parce qu’on ne connaît pas ça. Des émissions de nickel, ça ne vient pas nécessairement juste d’une mine de nickel», a indiqué M. Girard lors d’un entretien téléphonique.

Celui-ci a souligné que le port fait partie d’une zone industrielle où d’autres industries sont présentes, et qu’il y avait dans le secteur «quatre ou cinq autres sources potentielles, minimum». M. Girard n’a toutefois pas voulu en nommer, prétextant que «commencer ça, ce serait faire avec eux ce qu’on fait actuellement avec le port, et que je trouve dommage».

Le dirigeant du Port a également fait valoir que deux experts cités en ces pages cette semaine ont affirmé qu’on n’avait pas, pour l’instant, de preuve convaincante que le port était la source de pollution.

Rappelons que Le Soleil révélait lundi que, d’après des données du ministère de l’Environnement datant de 2010 à 2012, l’air de Limoilou contenait des quantités de nickel plusieurs fois supérieures aux normes de qualité de l’air. Le nickel et les molécules qu’il forme sont généralement considérés comme cancérigènes ou potentiellement cancérigènes, en plus de causer des troubles respiratoires.

Santé

Si jamais il était démontré que le problème est dans le port, dit M. Girard, «alors on prendra les actions qu’il faudra». Mais pour l’heure, il préfère s’en remettre à la Santé publique.

«J’ai parlé à François Desbiens [directeur régional de santé publique] jeudi, on collabore avec lui tout le temps. Et M. Desbiens dit : « Écoutez, on met la rigueur qu’il faut pour tirer des conclusions, mais quand bien même les gens tireraient après nous, on ne peut pas aller plus vite qu’on va là. »

«Et moi, c’est ça que je dis : calmons-nous un peu. On n’est pas à des mois d’avoir une réponse, on est à quelques jours seulement.»

****

Une contamination récente

Le problème de nickel dans l’air de Limoilou semble être relativement récent. Pas plus tard qu’entre 1995 et 1999, les concentrations de ce métal respectaient les normes actuelles de qualité de l’air dans le quartier, mais elles ont plus que doublé au cours des années 2000, lit-on dans le rapport d’enquête que la citoyenne Véronique Lalande et son conjoint Louis Duchesne ont remis lundi à la ministre Agnès Maltais.

Le couple limoulois, qui tient le Port de Québec responsable de la pollution métallique dans le secteur et milite depuis plusieurs mois pour qu’il change ses pratiques, a rendu le document public jeudi sur son site (http://goo.gl/iQ9tm).

D’après les données du ministère de l’Environnement qu’ils ont consultées, l’air de Limoilou ne contenait qu’environ 10 nanogrammes de nickel par mètre cube (ng/m3) entre 1995 et 1999, alors que la norme québécoise actuelle (entrée en vigueur en 2011, notons-le) est de 12 ng/m3. Cette moyenne est toutefois rapidement passée à plus de 20 ng/m3 en 2000-2004 et à 23 ng/m3 en 2005-2009.

Le Soleil a révélé lundi matin, en se basant sur d’autres données du Ministère, que cette concentration avait atteint 68 ng/m3 de 2010 et de 2012. Dans leur rapport, Mme Lalande et M. Duchesne arrivent à un résultat légèrement différent pour ces deux années, soit 52 ng/m3, mais leurs calculs se basaient sur les mesures de trois stations d’échantillonnage, alors que Le Soleiln’avait eu accès qu’à une seule.

Les données de Mme Lalande et de son conjoint confirment également que le nickel de Limoilou semble bien avoir une signature chimique particulière. Le ratio nickel-cobalt, en effet, peut changer d’une station d’échantillonnage à l’autre, mais il est remarquablement constant dans chacune de ces stations, ce qui suggère une source unique.

Leurs efforts ont aussi permis de constater que la concentration moyenne d’arsenic dans Limoilou approche du seuil fixé par le Ministère – à 2,5 ng/m3, soit à peine moins que la limite de 3 ng/m3.

via Nickel dans Limoilou: le Port de Québec tente de calmer le jeu | Jean-François Cliche | Santé.

Les commentaires sont fermés.