Second recours collectif autorisé contre Arrimage Québec | Le Soleil.

Publié le 04 août 2015 à 17h46 | Mis à jour à 21h35

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Second recours collectif autorisé contre Arrimage Québec

Le juge Étienne Parent de la Cour supérieure a officiellement autorisé la requête de demande en recours collectif de Véronique Lalande (photo) et Louis Duchesne, mardi. Photo: LE SOLEIL, PATRICE LAROCHE

 

David Rémillard, Guillaume Piedboeuf

Le juge Étienne Parent a officiellement autorisé mardi l’exercice de ce second recours collectif déposé par la citoyenne Véronique Lalande et son conjoint Louis Duchesne. Ces derniers seront les titulaires au dossier et représenteront tous les citoyens admissibles au recours.

Cette autre requête couvre beaucoup plus large que la première, qui se limitait uniquement à l’épisode de poussière rouge – oxyde de fer – du 25 octobre 2012.

Mme Lalande, derrière le comité Vigilance port de Québec, visait cette fois toutes les émanations de métaux, dont la poussière de nickel, au-delà des seuils acceptables enregistrées depuis le 31 octobre 2010.

«Toutes les personnes propriétaires ou résidents depuis le 31 octobre 2010 de l’arrondissement de La Cité-Limoilou […] dans les secteurs délimités» par le recours peuvent y souscrire.

Cela inclut les résidents du Vieux-Limoilou habitant au sud de la 18eRue, du quartier Saint-Roch, entre la rivière Saint-Charles et le boulevard Charest, et de certaines portions des quartiers Saint-Sacrement, Saint-Sauveur et Maizerets.

Si les membres du recours gagnent en cour, les demandes des requérants prévoient un versement allant jusqu’à 1000 $ par année pour chaque membre de la poursuite. Ce montant représente les réclamations en dommages pour troubles et inconvénients et en dommages punitifs.

De l’opinion même du juge, ces réclamations sont basées sur des préjudices que «les faits peuvent alléguer». D’ailleurs, il ajoute que «la démonstration est faite que la présence de nickel, mesurée à divers points d’échantillonnage sur une période de temps étendue, dépasse de manière importante les normes réglementaires».

La requête demandait également des réclamations individuelles pour dommages à la santé et pour les pertes immobilières que pourraient avoir subi les membres du recours. Sur ce point, le juge émet plusieurs réserves, soulignant «qu’aucun fait allégué à la requête ne paraît [les] justifier». De tels dommages pourront malgré tout être réclamés.

Véronique Lalande a obtenu un autre gain significatif. Si la démonstration est faite qu’Arrimage Québec et le Port ont des responsabilités à assumer, la cour pourra émettr­e une injonction obligeant les deux parties poursuivies à prendre des mesures permanentes pour mettre fin aux émissions de poussières.

Le magistrat affirme que cette demande est légitime en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne. «Toute personne a droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité», stipule le document.

Arrimage Québec craignait que le premier recours collectif rassemble près de 50 000 citoyens. La compagnie évaluait que la somme à débourser en cas de défaite devant les tribunaux avoisinerait les 150 millions $. La première requête prévoit un dédommagement de 3000 $ par tête de pipe.

«C’est une victoire très douce-amère»

Citoyenne du Vieux-Limoilou derrière les démarches légales entreprises contre le Port de Québec et Arrimage Québec, Véronique Lalande voit l’autorisation d’un second recours collectif comme une grande victoire.

«C’est une victoire parce que c’est loin d’être évident, ça prend beaucoup de temps et d’énergie», a-t-elle expliqué, mardi, quelques heures après que la décision du juge eut été rendue.

«En même temps, c’est une victoire très douce-amère, parce que j’aurais préféré ne pas l’avoir», a-t-elle nuancé. «Le Port de Québec aurait pu mettre en place, en 1980, alors qu’il le savait déjà, des mécanismes qui auraient fait en sorte que je n’aurais jamais vécu cette situation-là.»

Au-delà des dédommagements, Véronique Lalande se réjouit surtout de l’autorisation de la demande d’injonction, qui avait été rejetée dans le premier recours collectif. C’est l’injonction qui forcera le Port à prendre des mesures pour remédier aux émanations de poussière rouge, en cas de défaite en cour. «C’est le plus important dans la décision d’aujourd’hui. Tous les gens concernés nous disaient toujours que si ce processus-là peut faire en sorte que la situation arrête définitivement, il faut aller au bout.»

Maintenant que le recours collectif est autorisé, la résidente de Limoilou et son conjoint Louis Duchesne se lancent dans un long processus devant les tribunaux. D’ailleurs, il n’y a encore aucun avancement tangible dans le premier recours, autorisé en octobre 2014.

Mais la longueur de la démarche légale n’effraye pas Véronique Lalande. «Il y a trois ans, j’ai reçu un appel d’Anick Métivier, le représentant du Port de Québec, où il tentait de me rassurer gentiment en m’expliquant que le nuage de poussière rouge était un incident isolé. Je lui ai dit que maintenant que je l’avais trouvé, je ne lâcherais pas tant que le Port ne deviendrait pas l’entreprise citoyenne qu’il aurait toujours dû être et que l’on mérite comme ville. Trois ans plus tard, c’est toujours mon objectif.»

Consciente que les deux recours collectifs exercent une pression financière sur le Port, la citoyenne espère que les deux parties réussiront éventuellement à conclure une entente à l’amiable plutôt que de se rendre au bout du processus. Sauf que tant que le Port refusera de reconnaître sa responsabilité et prendre les mesures qui s’imposent, Véronique Lalande ne reculera pas. «Moi, je suis partie pour 30 ans, mais ça ne me dérange pas. Chaque étape est importante et ce genre de démarche est nécessaire dans une société démocratique.»

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